septembre 2016
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En marche vers le prélèvement à la source

Le ministre des finances et le secrétaire d’Etat chargé du budget ont présenté début aout une communication relative à la mise en œuvre du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu qui a été confirmé par le Parlement dans la loi de finances pour 2016.

Serpent de mer de la fiscalité française, le prélèvement à la source consiste à retenir l’impôt directement sur la rémunération du contribuable plutôt que de le laisser la percevoir pleinement en année N, déclarer ses revenus et payer l’impôt ensuite en année N+1.

 

La réforme ne modifie pas les règles de calcul de l’impôt ; le montant dû au titre d’une année ne changera donc pas :

  • Le barème de l’impôt sur le revenu n’est pas modifié ; il restera notamment progressif et il prendra toujours en compte l’ensemble des revenus perçus par le foyer ;
  • La « familialisation » et la « conjugalisation » de l’impôt seront conservées ;
  • L’imputation de réductions ou/et l’octroi de crédits d’impôts seront maintenus ;
  • La déclaration de revenus ainsi que l’avis d’imposition seront conservés

 

Qui sera concerné ?

La quasi-totalité des revenus et des contribuables sont visés par la réforme.

Elle concernera les traitements et salaires, les pensions, les revenus de remplacement (allocations chômage notamment), les revenus des indépendants (en particulier les bénéfices agricoles) et les revenus fonciers.

Seuls les revenus de capitaux mobiliers et les plus-values immobilières ne sont pas concernés puisqu’ils sont déjà prélevés à la source.

 

Comment sera collecté l’impôt ?

Pour les salariés, l’impôt sera prélevé par l’employeur sur la base d’un taux moyen fourni par l’administration fiscale et calculé en fonction des revenus de l’année précédente. Ce taux apparaîtra sur la fiche de paie au même titre que les cotisations sociales.

Pour les retraités, ce sont les caisses de retraite qui se chargeront de la collecte.

Les travailleurs indépendants seront tenus, quant à eux, de verser un acompte mensuel ou trimestriel, calculé par le ministère des Finances d’après leurs revenus des exercices précédemment déclarés puis ajusté selon leurs revenus effectifs.

Les bailleurs devront effectuer les retenues par eux-mêmes en se référant aux indications de l’administration fiscale.

 

La question de la confidentialité

La question de la confidentialité a été un sujet d’inquiétude et de discussions puisque l’employeur aura connaissance du taux d’imposition de son salarié et donc de sa situation financière supposée.

Les salariés qui le souhaitent pourront donc refuser que l’administration fiscale transmette leur taux personnalisé à leur employeur et pourront opter pour l’application d’un taux neutre.

Il sera alors calculé sur la base du montant de la rémunération versée par l’employeur.

Le contribuable versera chaque mois de son côté le différentiel à l’administration fiscale.

 

Calendrier

Le calendrier de mise en œuvre fixé par le gouvernement est clair :

  • au second semestre 2017, l’administration fiscale communiquera à l’employeur (ou aux autres verseurs de revenus) le taux de prélèvement calculé avec les revenus 2016 déclarés au printemps 2017 ;
  • dès le premier revenu versé en 2018, ce taux de prélèvement sera appliqué au salaire, à la pension ou au revenu de remplacement. Le contribuable connaîtra également ce taux puisqu’il figurera sur son avis d’imposition adressé à l’été 2017.

 

Sur la fausse année blanche

Il n’y aura pas de double imposition en 2018.

En 2018, les contribuables paieront leur impôt sur leurs revenus 2018

Il n’y aura pas d’impôt sur les revenus non exceptionnels perçus en 2017.

La définition des revenus non exceptionnels figurera dans la loi pour éviter les abus et les effets d’aubaine.

Il y aura donc une rupture d’égalité devant l’impôt entre les contribuables puisque les revenus exceptionnels perçus en 2017 seront soumis à l’impôt à l’inverse des revenus non exceptionnels qui ne le seront pas.

Comme souvent en matière fiscale, le conseil constitutionnel nous délivrera une analyse juridique de circonstance pour que les finances publiques soient préservées et pour sauver le « soldat Bercy ».

En fonction de la définition qui sera donnée des revenus exceptionnels (extensive ou restrictive), l’Etat pourra en 2018 y trouver un gros avantage en trésorerie.

 

Le taux de prélèvement sera actualisé en septembre 2018 pour tenir compte des changements éventuels consécutifs à la déclaration des revenus de 2017 effectuée au printemps 2018. C’est ce taux qui sera utilisé à partir de janvier 2019 et qui sera ensuite à nouveau actualisé chaque année en septembre.

 

Loin d’être la grande révolution annoncée, cette réforme ne fait que modifier le prélèvement de l’impôt en supprimant le décalage d’un an.

Nous espérions un prélèvement libératoire qui supprimerait la complexité de la déclaration de revenus et du calcul de l’impôt. Il n’en est rien, cette réforme a minima consiste tout simplement en une forme de mensualisation généralisée avec de nombreuses sources de complexité à prévoir pour les revenus non salariaux

La vraie révolution aurait été de supprimer le barème, le quotient familial et toutes les niches fiscales pour instaurer un taux forfaitaire unique, fixe et universel.

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