novembre 2016
archives

Conséquences d’une restitution irrégulière des documents comptables emportés par l’administration fiscale (Conseil d’Etat 23/11/2016)

Le lieu normal d’exercice du contrôle fiscal est le siège de l’entreprise.

Par dérogation à ce principe selon lequel l’examen de la comptabilité doit se dérouler sur place, à la demande du contribuable, la vérification de comptabilité peut se dérouler, le cas échéant, dans d’autres locaux et notamment dans les locaux des services fiscaux.

Dans cette hypothèse, le vérificateur peut emporter certains documents dans les bureaux de l’administration, qui en devient ainsi dépositaire et il doit remettre au contribuable un reçu détaillé des pièces qui lui sont confiées.

En outre, cette pratique ne peut avoir pour effet de priver le contribuable des garanties qu’il tient des articles L. 47 et L. 52 du livre des procédures fiscales et qui ont notamment pour objet de lui assurer des possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur postérieurement à la proposition de rectification notamment.

Dans cette affaire soumise au Conseil d’Etat, le contribuable a écrit à l’administration pour que la vérification de comptabilité se déroule dans les locaux de l’administration fiscale et que celle-ci puisse conserver l’ensemble des documents comptables relatifs à la période vérifiée pendant la durée du contrôle.

L’administration a bien délivré à l’intéressé des reçus détaillés des pièces qui lui ont ainsi été confiées.

A l’issue de la vérification, l’administration a sollicité le concours d’un huissier de justice pour procéder à la restitution des documents comptables de la société à la dernière adresse connue du gérant.

La restitution de ces documents a effectivement eu lieu ainsi qu’il ressortait de l’acte d’huissier.

La société soutenait toutefois que la restitution de ses documents comptables était incomplète et faisait valoir que le procès-verbal de restitution, faute d’avoir été signé par un représentant de l’administration fiscale, ne permettait pas d’attester du contenu des boîtes remises à son gérant.

Le Conseil d’Etat relève que « si cette remise a été accompagnée d’un document intitulé  » Procès-verbal de restitution de documents comptables et de pièces justificatives « , ce document, qui n’est signé ni du contribuable, ni du représentant de l’administration fiscale, n’est pas de nature à attester du contenu effectif des boîtes.

Par ailleurs, et contrairement à ce que soutient l’administration, l’acte d’huissier, tel qu’il est rédigé, n’a pas pour objet de recenser les pièces contenues dans les boites, mais seulement d’authentifier la remise effective de ces boîtes à leur destinataire. Dans ces conditions, la requérante contestant précisément avoir reçu l’ensemble des documents comptables emportés, l’administration ne peut être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, qu’elle a restitué avant la fin des opérations de vérification l’intégralité de ces documents. »

Pour la haute Cour, Il en résulte que la société, à défaut d’avoir été mise en possession de tous les documents comptables qu’elle avait confiés au vérificateur, a été privée de la possibilité d’engager un débat oral et contradictoire avant la fin des opérations de vérification.

Dans ces conditions, et nonobstant la circonstance que le vérificateur a rencontré à plusieurs reprises la société et a tenu une réunion de synthèse à l’issue de la vérification, celle-ci s’est trouvée entachée d’une irrégularité qui vicie la procédure d’imposition.

La société est donc déchargée des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée.

imprimer